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Marie : c'est arrivé du jour au lendemain

Témoignage de Marie

Je me souviendrai longtemps de ce matin du 30 octobre 2004. Lorsque je me suis levée, j’avais une douleur dans les côtes du côté droit. Comme nous avions des invités ce soir là, je n’y ai pas prêté d’attention, et j’ai forcé pour faire le ménage et la cuisine. Le lendemain matin, il m’a été impossible de mettre le pied par terre, Daniel a été obligé de m’aider, j’ai passé une journée épouvantable à me tordre de douleur, mais en pensant que ça allait passer.

Le 1er novembre, mon état avait empiré, je me suis fait conduire chez le médecin de garde qui a pensé que j’avais un problème aux côtes. Au bout de quelques jours, après diverses consultations, radiographies, un traitement anti-inflammatoire et anti-douleur, les choses sont rentrées dans l’ordre. A partir de ce moment-là, j’ai eu des douleurs à la vessie et une impossibilité, presque totale, d’uriner. Mon médecin m’a pris un rendez-vous avec un urologue pour le 10 décembre, j’étais affolée de devoir attendre un mois dans cet état, les mictions se faisaient au goutte à goutte après de gros efforts, les brûlures et les douleurs dans la vessie quasiment insupportables, j’avais l’impression qu’un rat me dévorait de l’intérieur, qu’on me passait une brosse métallique dans l’urètre et que des poignards me traversaient tout le bas-ventre y compris le vagin et le rectum et mes nuits se limitaient à 4 h de sommeil maximum. 

Le 10 décembre, j’ai rencontré un urologue peu bavard, qui m’a juste dit que c’étaient des suites normales de mon cancer, qui datait de 10 ans et m’a donné rendez-vous pour une cystoscopie, sous anesthésie générale, le 14 décembre. Lors de la cysto il m’a calibré l’urètre et réséqué le col et fait une biopsie. Pour passer cette cysto, il fallait être à jeun depuis la veille 19 h, j’étais convoquée à 7 h du matin, ce fut l’enfer, j’ai attendu jusqu’à 11 h, je n’arrivais plus du tout à uriner, j’avais la bouche très sèche et une soif intense, il a fallu que je décide de m’en aller pour être prise en charge. La biopsie mentionnait quelques éléments anormaux et concluait à une cystite congestive et fibreuse chronique. Le 20 décembre j’aurais hurlé tellement j’avais mal, même si les mictions étaient plus faciles, j’allais aux toilettes toutes les demi-heures, je me suis fait conduire à la clinique. J’ai été reçue par l’urologue qui s’est montré hautain et méprisant, il m’a examinée d’une façon brutale et humiliante et m’a dit que je n’avais rien, que si je n’étais pas contente il pouvait me mettre 2 jours sous perfusion, il m’a donné l’impression de me prendre pour une folle. J’étais en larmes devant un tel manque d’humanité et je suis repartie avec les mêmes douleurs, peut-être accrues par l’accueil de ce médecin. J’en étais arrivée à avaler tous les médicaments que je pouvais pour essayer de faire taire cette souffrance, j’aurais voulu avoir le courage d’ouvrir cette vessie que je sentais comme arrachée par petits morceaux. Mon médecin traitant m’a prescrit des piqûres de calmants, qui faisaient de l’effet pendant quelques heures, mais la douleur ne partait jamais complètement et il m’a pris rendez-vous avec un second urologue début janvier. Ce deuxième urologue était charmant, il m’a prescrit des hormones et donné un rendez-vous 3 mois plus tard. Ma douleur avait complètement été écartée de cette consultation, j’en étais atterrée, je commençais à me demander si je n’allais pas devoir mettre fin à mes jours pour que ça s’arrête. J’ai donc pris un RdV avec un 3ème urologue, celui-là s’est montré actif et m’a fait passer en urgence un scanner, il m’a hospitalisée dans sa clinique pour une 2ème cysto mais sans anesthésie. J’ai eu une perfusion de calmant, ce qui m’a permis de reprendre un peu de vigueur. A la cysto, ma vessie avait l’air tout à fait normale l’urologue m’a laissée sortir de la clinique sans me demander de le revoir, sans explication ni traitement, je souffrais toujours horriblement. Les conditions dans lesquelles j’ai passé cette cysto n’ont pas été meilleures que pour la précédente, je me suis retrouvé sur un chariot à attendre pendant une heure dans un sous-sol glacial, avec pour tout vêtement une chemise d’hôpital, sans possibilité d’aller aux toilettes, alors qu’à cette période j’y allais déjà toutes les 20 mn. Mi-janvier, j’étais convoquée à mon centre de traitement du cancer, par l’oncologue qui m’avait suivie il y a 10 ans, suite à un courrier dans lequel je lui demandais si mes ennuis urinaires avaient une relation avec ce cancer. Cette femme médecin, qui est quelqu’un d’extraordinaire, m’a longuement examinée, a gardé tous les résultats de mes examens qui étaient en ma possession, afin de les réétudier et elle m’a pris un RdV pour le lendemain à l’unité anti-douleur de ce centre. J’ai été reçue en consultation pluridisciplinaire par trois médecins, outrés par l’attitude du 1er urologue, ils m’ont dit qu’ils allaient étudier mon dossier et demander les pièces manquantes aux médecins que j’avais déjà consultés et ils m’ont prescrit de la morphine en gélules . J’y suis retournée début février et j’ai été choquée par leur changement d’attitude, ils ne prenaient plus en compte mes douleurs ni mes mictions fréquentes, toutes les 10 mn à ce moment-là, et m’ont orientée vers une consultation en psychiatrie. Je me suis vraiment sentie devenir folle, mais de douleur et de désespoir. Je n’avais plus qu’une obsession : que ça cesse ! que ce rat qui dévorait ma vessie, de plus en plus fort, s’en aille avec la brosse métallique qui déchirait mon urètre, que cessent aussi les coups de poignards qui étaient de plus en plus fréquents et violents, l’idée du suicide me poursuivait de plus en plus. Daniel était désespéré de me voir souffrir et d’être impuissant à me soulager, il essayait de me faire rire pour que je parvienne à penser à autre chose, mais je ne faisais plus que pleurer, quelques fois j’arrivais quand même à rire au milieu de mes pleurs, cette situation devenait pénible à vivre pour tous les deux. 

Je venais de trouver un site québécois sur la CI dans lequel j’ai laissé un message, les réponses étaient unanimes : " tu as une CI ! ". Je n’avais jamais entendu parler de cette maladie et j’ai donc fait des recherches. 

Mon médecin traitant me prescrivait des calmants sous forme de piqûres, mais ce ne pouvait être que provisoire. Il a pris connaissance de tous les documents que je lui ai amenés et en a conservés quelques uns, je dois dire que son soutien m’a beaucoup aidée à traverser cette période. 

En février , après m’être fâchée contre les médecins de mon centre douleur, j’ai trouvé grâce au site un urologue dans une autre ville, en fait j’avais le choix entre deux, j’ai, évidemment, choisi le mauvais, car le second est un Professeur et j’ai eu peur de me retrouver, à nouveau, devant un homme froid et sans coeur. J’ai eu une cysto avec hydrodistension à 700 ml, sous anesthésie générale. Cet urologue, au départ convaincu que j’avais une CI, a aussi brusquement changé d’attitude, sans que j’en connaisse la raison, après avoir contacté le 1er urologue, et m’a annoncé que je n’avais qu’une banale cystite. Pourtant la biopsie qu’il m’a faite mentionne clairement " aspect compatible avec une CI, si absence de germe dans les urines ", lui non plus, ne m’a pas redonné de RdV. 

J’ai eu une explication avec un des médecins de mon centre anti-douleur et j’ai accepté de le revoir mi-avril pour faire le point. Il était convaincu que j’avais bien une CI et m’a prescrit des calmants, il a fait une demande d’ATU pour l’obtention de l’Elmiron, que j’ai eu début mai.

J’étais soulagée d’avoir enfin un diagnostic même si l’avenir ne s’annonçait pas rose j’avais encore confiance en la médecine. 

Mes douleurs étaient toujours là, quasi permanentes, et je ne voulais pas rester à attendre, j’ai repris mes recherches, je suis en attente pour tenter un nouveau traitement qui n’est pas utilisé en France, le système EMDA, dans lequel je mets tous mes espoirs d’arriver au moins à soulager ces douleurs continuelles, en ce moment j’arrive à marcher avec difficulté et les trajets en voiture sont épouvantables, ma vie est pire que celle d’un légume. Il faut pour réaliser cet essai en France que j’aie l’aval d’un urologue, sinon je le ferai à l’étranger. Je dois être hospitalisée le 12 septembre pour faire des essais de calmants et arrêter de fumer, car la cigarette n’arrange pas les choses. J’espère que cette fois je ne vais pas, à nouveau, me retrouver projetée dans un cauchemar.

Depuis le mois de mars, je ne fais pratiquement plus rien, je suis en arrêt de travail ; les commissions, les promenades, les sorties au restaurant, les vacances, la pêche, le jardinage, tout ce que j’aimais m’est désormais impossible, je fais un minimum de ménage au prix de gros efforts et de douleurs, il en est de même pour le repassage, les autres travaux ménagers et nous n’avons plus de vie sexuelle. 
Les mictions sont tout de même moins fréquentes, grâce à l’Elmiron et aussi à un TENS ( ?), j’ai utilisé aussi de la morphine en gélules, mais elle me provoque des nausées, je la tolère mieux en patch; j’ai aussi du Laroxyl et de l’Atarax, qui m’assomment. J’ai de nouveau beaucoup de mal à uriner, il m’arrive, depuis le mois d’avril de m’endormir sur les toilettes et d’avoir envie d’aller aux urgences, afin qu’ils m’aident à uriner. Je pense que ma vie est fichue et je suis entrain de gâcher celle de Daniel. Il n’y a, pour l’instant, plus qu’une solution essayer l’EMDA. 

Maintenant, j’ai perdu la confiance que j’avais dans les médecins, excepté mon médecin traitant, et c’est très dur de ne pas pouvoir les rencontrer sans appréhension et sans faire des crises d’angoisse. 
Je refuse d’accepter le verdict des médecins qui est : " de vivre avec ces douleurs et de m’y habituer ", ainsi que de continuer à passer des nuits sans dormir.



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